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Les Pensées d'une Lycéenne Frappée

Ecrits, critiques, pensées...

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La Fleur de Paix

--> A propos du néo-nazisme, inspiré d'American History X

La Fleur de Paix

I

Marie fouilla des yeux la foule de lycéen groupé devant les grilles du lycée Voltaire. Chevelures brunes, blondes ; difficile de différencier les garçons des filles depuis la mode des cheveux longs. Rastas, gothiques, punks, métalleux ; groupuscules plus ou moins reconnus, nombreux, extrêmes ou modérés, mais tous reconnaissables par leurs coiffures, vêtements, couleurs, bijoux. Et puis elle le vit.

 

Il n’y en avait qu’un comme lui. Un seul crane rasé, presque complètement chauve, parmi les cheveux longs de ses camarades. Son traits était très marqués ; ses pommettes saillaient, ses yeux étaient très enfoncés dans leurs orbites et ses lèvres fines semblaient figées dans une expression de gravité attentive.

 

« Gautier ! » cria la jeune fille.

 

Il se tourna vers elle. Pour la première fois depuis son arrivée au lycée, son visage fut éclairé d’un doux sourire et ses yeux pétillèrent. Elle courut vers lui et colla sur ses lèvres un baiser affectueux.

 

« Ca va ? demanda-t-il.

- Bien sûr ! répondit-elle aussitôt d’un ton aussi excité que celui du jeune homme était calme. J’ai bien failli être en retard, heureusement mon père n’était pas encore parti à son travail… »

 

Elle continua son bavardage avec enthousiasme. Marie avait l’habitude de ponctuer ses paroles de gestes, de mimiques et de regards qui rendait chacun de ses propos vivants. Gautier ne se lassait jamais de l’écouter. Ils se complétaient, lui placide et silencieux, elle émotive et bavarde. Il arrivait de temps à autre que les rôles s’inversent, alors elle l’écoutait patiemment, buvant ses propos avec attention.

 

Même physiquement, ils étaient diamétralement opposés. Elle disait souvent pour plaisanter avoir assez de cheveux pour deux, sa crinière noire et fournie tombant bien en-dessous de sa taille ; elle possédait des yeux sombres et curieux, lui les avaient gris et quasiment inexpressifs. Marie était vêtue de noir et de rouge sang, lui de couleur passe-partout, du blanc, du gris, du bleu pâle.

Leur seule homogénéité se retrouvait dans leur complexion laiteuse et leur taille moyenne, qui leur permettaient de se confondre parmi les autres lycéens.

 

L’heure vint de rentrer dans le sombre bâtiment scolaire. Tous deux rentraient en terminale, pas les mêmes cependant. Elle, si fantasque et imaginative, rentrait dans la classe restreinte et fofolle des littéraires. Lui, matheux et discret, réintégrait l’univers scientifique.

 

Ni l’un ni l’autre ne trouvèrent grand-chose de neuf depuis l’année précédente. Quelques élèves avaient changé -peu- et les profs permutaient… Rien de nouveau sous le soleil… Pas même les dessins énigmatiques et menaçants dissimulés avec prudence dans les cahiers de Gautier…

II

            « N’y va pas, Gautier. »

            Il faisait nuit. Elle était allé chez lui afin de lui répéter ce qu’elle soutenait depuis maintenant depuis une semaine.

            « Il ne faut pas que tu y ailles ! répéta-t-elle.

            - Et pourquoi je n’irais pas ? » lâcha-t-il.

 

            Si calme à l’accoutumée, ce soir-là il était furieux contre elle. Sa colère se lisait dans ses prunelles grises. Son visage placide montrait aujourd’hui de la détermination, de la conviction, de la rage contre cette fille qu’il aimait et qui voulait en profiter pour lui faire renoncer à ce qui avait toujours été sa raison de vivre encore.

 

            « Parce que c’est dangereux. Tu le sais.

            - Il y a même des sports plus dangereux que ça.

            - Mais merde, Gautier, fais pas semblant de pas comprendre ! s’emporta Marie. C’est stupide ce que vous allez faire. Je pige pas comment tu peux te laisser entraîner à faire des trucs pareils avec ses mecs débiles !

            - Ces mecs débiles sont mes amis ! hurla-t-il à son tour.

            - Tu les as mal choisi ! »

 

            La claque arrive sans prévenir. Marie colla sa main sur sa joue enflammée. Elle ne dit rien pendant un moment, puis reprit, des sanglots dans la voix.

 

            « Je sais que tu es un mec bien, Gautier. Mais t’as vu ce qu’il font de toi ? Tu es un garçon tellement bien d’habitude… Mais dès qu’il s’agit d’eux et de ce que vous faites… Tu deviens… Je sais pas ce que tu deviens… Mais j’aime pas ça, Gautier. J’aime pas ça. »

 

            Il pencha vers elle son visage empreint de fureur.

 

            « Tu comprends rien. T’es peut-être intelligente, mais tu comprends rien quand il s’agit de mes idées. T’es toujours prête à défendre tes points de vue, et les miens, il passent à l’as… J’irais, tu m’entends, je fais ce que je veux ! Alors maintenant si ça heurte ta sensibilité, tu peux aller te faire voir… »

 

            Il la laissa là, sanglotant, plus blessée par les paroles qu’il avait proféré que par la gifle qui avait laissé une trace rouge sur sa joue.

III

            Elle avait les yeux rouges. En noir des pieds à la tête, une rose blanche dans la main, elle fixait la tombe neuve qui s’élevait devant elle. Elle lisait et relisait l’inscription sans vraiment vouloir la comprendre.

Gautier Le Fazou

2 août 1987 - 14 octobre 2004

            C’était injuste. C’était si injuste. Il était le seul récupérable de toute leur foutue bande… Elle lui avait bien dit de ne pas aller à leur ‘sortie’… Elle savait bien ce que cela signifiait. Casser la gueule à un noir, à un arabe ; taguer une mosquée, une synagogue, des tombes…

            Des tombes comme celle qu’elle avait devant elle, sous le soleil froid d’octobre… Elle n’était pas allée à l’enterrement. Elle ne voulait pas croiser ces abrutis, tous plus vieux que Gautier, qui l’avait laissé se faire tuer alors que c’était eux qui méritaient de mourir. C’était eux qui l’avaient contaminé avec leur dogmes idiots quand le frère de Gautier était mort. Tué. Par un noir. Ce sont des choses qui arrivent.

            Ils avaient rejeté tout ça sur les noirs en général. Gautier s’était laissé embobiner…

 

            Marie s’agenouilla devant la tombe. Elle ne croyait pas en dieu. Elle ne pria pas. Elle se demanda juste… Avait-il pensé à elle avant de mourir ? Avait-il regretté de ne pas l’avoir écoutée ? Lui en avait-il voulu ?

            Ses larmes tombèrent sur le marbre froid. Elle resta longtemps sur la tombe.

 

            Quand elle se releva, ses yeux étaient rouges, mais secs. Elle prit une profonde inspiration et murmura :

 

            « Au revoir Gautier. Tu vas énormément me manquer. »

 

            Elle se pencha et déposa délicatement sa fleur blanche sur le marbre gris.

 

            « J’espère que tu as trouvé la paix. »

Ecrit par Kit, le Mardi 24 Août 2004, 02:05 dans la rubrique "Nouvelles".

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Commentaires

lejouebeurfou

lejouebeurfou

24-08-04 à 19:44

j'aime bien tes textes Kitty


Re:

Kit

Kit

25-08-04 à 13:37

Je te remercie, le jouebeur fou!
Kiss
Kitty


pinkphanthere

pinkphanthere

24-08-04 à 21:34

Whaou!!Vraiment c'est superbe, j'ai rarement lu une nouvelle comme ça, tu transmet beaucoup d'émotio, j'adore!!En plus j'ai vu le film American History qui m'a marqué,tu tt'en ai inspiré et j'en ai les larmes aux yeux en le lisant, encore bravo!!!


Re:

Kit

Kit

25-08-04 à 13:40

Je te remercie beaucoup! Moi aussi ce film m'a beaucoup marqué [même si j'étais bourrée et qu'il était 5h30 quand il s'est terminé, humph], et j'avais beaucoup apprécié les acteurs [même avec 1/2 L de vodka orange dans le sang elle trouvait encore le moyen de fantasmer sur Edward Furlong].
Bises
Kitty


AHHHH ! :-))

schribethor

schribethor

24-08-04 à 22:28

La je te retrouve avec tes textes pleins de morales, de critiques, de vie aussi. Cela parait tellement vrai, tellement plausible. Oui ce que tu fais c'est bien.  C'est simple "bien" comme mot et il est utilisé très souvent pour des choses qui ne méritent pas cette expression. Sache que pour moi "bien" ca veut dire beau, vrai, interessant. Voila encore un petit chapeau baissé, un jour j'esayerai de mettre dans mes nouvelles des textes de ce genre pour le moment je suis encore au niveau inferieur, different aussi.

Camille


Re: AHHHH ! :-))

Kit

Kit

25-08-04 à 13:58

Je te remercie beaucoup! Publieras-tu bientôt tes nouvelles sur ton joueb?
Kiss
Kitty


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