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Les Pensées d'une Lycéenne Frappée

Ecrits, critiques, pensées...

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Rêve Blanc

--> Histoire de la déchéance d'un jeune drogué...

Alors il parait que je me suis gourée, que c'est l'héroïne qui fait cet effet-là, mais j'ai la flemme de corriger... Merci quand même à Miko pour me l'avoir fait remarquer!

Rêve Blanc

 

 

            Mes mains tremblent en ouvrant le sachet de poudre blanche. Les larmes me brouillent la vue. Il faut que je me calme, sinon je vais tout renverser. Je repose le sachet sur la petite table d’acajou et je me prends la tête entre les mains. Je suis à genoux, au milieu de ma chambre. J’ai du mal à respirer. J’ai mal au ventre. Ma gorge est sèche. Et dans quelques minutes, ce sera probablement pire. Je serai défoncé, mon nez sera certainement en sang ; et je n’aurai plus qu’à m’écrouler sur le tapis pour oublier. Enfin, essayer.

 

 

            Je suis dans une impasse. Je n’ai que dix-neuf ans ; mais je ne pense pas que beaucoup d’hommes plus vieux que moi aient aimé au point de se détruire comme je le fais. Pour une femme. Et accessoirement, un ami. Je me hais de les gêner. Je les hais de me torturer, de me tuer lentement comme ils le font. Mais je les aime trop pour le dire. J’ai si peur de les voir malheureux. Si peur de provoquer, par ma bêtise, les larmes d’Anna. Si peur d’éteindre un jour, par ma haine, la lueur candide qui brille encore dans les yeux de Pierre. J’ai si peur qu’ils me découvrent, qu’ils me percent à jour. Et tellement peur de les blesser…

 

 

            Ce n’est pas ma faute, pourtant. Pas la leur non plus. Quand j’ai débarqué dans leurs vies, ils étaient déjà ensembles. Il avait treize ans, et elle, juste quatorze. Moi j’étais beaucoup plus vieux. Déjà dix-huit. Je suis tombé suis tombée amoureux à la seconde même où j’ai vu Anna. Elle était belle. Elle avait un pull bleu. Elle l’a toujours, d’ailleurs. On a vite sympathisé, tous les deux. Avec Pierre aussi. Elle m’a plus ou moins pris sous son aile. Ils étaient jeunes, mais ils étaient mes égaux.

 

 

            J’ai essayé de me convaincre qu’Anna n’était qu’un béguin. Je lui ai cherché des défauts. Et j’en ai trouvé. Mais c’était peine perdue. Chaque défaut ajoutait à son charme. Ses talents m’ont surpris. Son intelligence m’a subjugué. J’ai essayé de haïr Pierre. Nouvel échec. Pierre est un des garçons les plus incroyables que je connaisse. Il est si vif. Si sensible. Il a des yeux désarmants ; parfois graves, parfois candides. Il m’est impossible de haïr Pierre. Alors j’ai cessé de lutter.

 

 

            Et puis là, coup du sort. J’aurais pu rester à ma place. Juste penser, rêver d’Anna. Leur sourire à tous les deux. Rester naturel. Souffrir. Et puis j’aurais fini par oublier. Mais non.

 

 

            Il y avait un mec qui ne supportait pas Pierre. Je n’ai jamais su pourquoi. Je ne l’aimais pas, ce mec. Malheureusement, il était plus fort que Pierre. Je les ai retrouvés un jour tous les deux. Pierre était sur le sol. L’autre le frappait avec rage. J’ai essayé de les séparer. Alors il m’a gueulé dessus. Il a crié que je n’étais qu’un petit con, qu’il me rendait service, que s’il le tuait, j’aurais le champ libre avec Anna, parce que je l’aimais, Anna, ça se voyait comme le nez au milieu de la figure, dis-moi, tu l’aimes, hein ?

            J’aurais dû me taire. Juste frapper. Mais j’ai parlé. Juste un mot.

            « Justement »

 

 

            Pierre m’a regardé. J’ai tabassé le garçon. J’ai pris Pierre par le bras et je l’ai ramené chez lui. Son regard de pitié me rendait malade. Je crois que j’ai pleuré. Il m’a serré dans ses bras ; il m’a dit qu’il était désolé, que j’étais le garçon le plus courageux qu’il connaissait, que j’étais son meilleur ami. Mais je savais déjà que la blessure que j’avais ouverte ne se refermerait plus. Ni pour lui, ni pour moi.

 

 

            Il n’a rien dit à Anna. Je l’avais supplié de se taire. Petit à petit, l’événement a perdu son importance. Mais il restait une trace. C’est pourquoi, des mois plus tard, Pierre a débarqué à la maison. Il pleuvait des trombes d’eau, le pauvre garçon était trempé comme une souche. J’ai eu un pincement au cœur. J’ai sentit qu’il allait me proposer quelque chose de fou. Je nous ai fait un café, mis une couverture sur ses épaules trempées et c’est alors qu’il m’a demandé. Cette chose incroyable.

 

 

            Je n’y ai pas cru tout de suite. J’ai d’abord pensé que mon imagination me jouait des tours. Mais non. J’étais abasourdi. Après quelques secondes de stupeur, deux mots me sont venus sans même que j’y pense : mais… Pourquoi ?

 

 

           J’ai vu les yeux de Pierre se remplir de larmes. Il s’est mis à sangloter. Anna avait maintenant quinze ans. Lui n’en avait que quatorze. Chez lui, la puberté n’avait pas encore commencé son œuvre. Il parlait encore avec une voix de soprano, faisait une tête de moins qu’elle et n’avait encore jamais eu besoin de se raser. Mais Anna, elle, était déjà une femme. Précoce dans tous les domaines. Dans celui du sexe comme dans tant d’autres. Pierre faisait toujours de son mieux face à Anna. Il faisait tout pour lui montrer de la tendresse. Mais depuis quelques temps, cela ne suffisait plus. Oh, elle ne disait rien, bien sûr. Mais jour après jour, Pierre sentait pointer chez elle un peu d’ennui, d’impatience, d’agacement. Pierre avait commencé à avoir peur. Il ne lui suffisait plus. Il avait besoin d’aide. C’est pourquoi, pour la troisième fois, il m’a demandé : est-ce que tu veux faire l’amour à Anna pour moi ?

 

 

            J’ai dit oui. On m’aurait dit oui, on m’aurait raconté mon futur, ma déchéance, eh bien… Eh bien je crois que j’aurais dit oui quand même. Je n’aurais probablement pas pu m’en empêcher. Je ne sais pas comment Pierre l’a annoncé à Anna. Je crois que je n’aurais pas aimé être à sa place. A ce que j’ai cru comprendre, elle l’a très mal pris. On en a plus reparlé.

 

 

            Et un jour, c’est revenu, comme par hasard, par miracle, ou… Par malchance, peut-être ? En rentrant chez moi, j’ai trouvé Anna sur le palier de mon appartement. Je n’ai pas vraiment de souvenir de cette nuit-là, rien que de vagues impressions. Des sensations. Un plaisir béat. Elle avait la peau douce. Elle avait un drôle de parfum. C’était un parfum d’homme, je l’aurais parié. Pendant de brefs instants, je me suis cru heureux. J’avais ce que je désirais depuis si longtemps. Je pensais que ça me suffirait. Je me suis dit que trois était peut-être le chiffre idéal. La suite des évènements sembla me donner raison. Pierre semblait soulagé. Anna était gaie. Leur couple allait mieux. On les voyait de plus en plus souvent dans les bras l’un de l’autre. Et moi, j’étais heureux. Nous étions tous les trois soudés. Anna venait souvent. C’était parfait. Jusqu’à ce que je comprenne. Ca m’a prit de temps. Mais j’ai finit par réaliser.

 

 

            Pierre avait réfléchi à deux fois avant de me proposer ça. Une de ses craintes était qu’Anna le quitte pour moi. Eh bien il avait tort de se faire du souci. Anna ne m’aime pas. Elle ne m’aime pas. Cette phrase est apparue dans ma tête comme par magie. J’étais chez moi, un verre de Coca à la main, quand je l’ai compris. Soudain, ma vue s’est brouillée. J’ai lâché mon verre qui s’est brisé sur le sol. Je me suis senti très mal. Je suis sorti prendre l’air. Mais je ne me sentais pas mieux. ANNA NE M’AIME PAS. C’était comme gravé dans mon esprit. Elle est venue à la maison quelques jours plus tard. Elle m’a demandé pourquoi je ne les avais pas rappelés. Je n’ai pas répondu. Elle m’a embrassé peu après. D’habitude, il n’en fallait pas plus pour m’exciter. Mais cette fois-là, je l’ai ressentit comme une brûlure. J’ai voulu lui crier d’arrêter. J’avais mal. Son contact m’était insupportable. J’ai voulu hurler. Je ne l’ai pas fait.

 

 

            C’est devenu invivable. Je les voyais de moins en moins. Et quand Anna, toujours aussi rayonnante, venait me voir, je m’efforçais de faire bonne figure, malgré la douleur qui me tiraillait le ventre. J’aurais dû lui dire, alors. J’aurais dû lui dire ce qui n’allait pas, que je ne voulais plus la voir, que je voulais arrêter. Mais je ne pouvais pas. Je l’aimais trop. Je l’aime toujours.

 

 

            J’ai essayé de trouver un moyen de ne plus y penser. Je me suis découvert un ami dans le rhum. Ca a marché quelques temps. Mais ça n’a pas suffit. Alors j’ai trouvé la coke.

 

 

            La poudre blanche. On en respire, et hop ! Tous vos ennuis disparaissent. Très efficace. Une ligne ou deux avant l’arrivée d’Anna m’aidait à moins souffrir. Parfois, je réussissait même à me convaincre que c’était de moi dont elle était amoureuse.

 

 

            Mais la cocaïne, ça pardonne pas. Anna et Pierre ont finit par se rendre compte que je n’étais pas dans mon état normal. Mais cela me laisse si froid, désormais. Ils continuent à venir. C’est un supplice. Pour eux comme pour moi. J’ignore pourquoi ils s’obstinent. Je me sens si mal. Mais je maîtrise mes gestes. Je verse la poudre. Je fais des lignes.

            Je respire enfin.

            Je m’écroule.

            Rien n’a plus d’importance. Je me roule en boule sur le lit. J’imagine qu’Anna est là. Elle m’embrasse sur le front.

            Je souris.

            Je t’aime Anna.

Ecrit par Kit, le Dimanche 20 Juin 2004, 18:20 dans la rubrique "Nouvelles".

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Commentaires

Oh...

Scrunch

Scrunch

20-06-04 à 19:08

J'adore... Et cela parait si réel...

Bravo.


Re: Oh...

Kit

Kit

20-06-04 à 19:12

Merci bcp! :)


Laure

23-06-04 à 11:27

MA-GNI-FI-QUE !!!! ;-)


Re:

Kit

Kit

24-06-04 à 00:09

Je te remercie du compliment!
Kiss
Kitty


laur

02-07-04 à 14:07

génial !! t'as vraiment du talent !! j'ai adoré ! c'est comme si on regarder un film ! super réel !!


Re:

Laure

03-07-04 à 10:48

Ha il y a une autre Laure que moi... bon pour se différencier, moi c'est Laure avec une majuscule et un e, et l'autre c'est sans e ok ???


Re: Re:

Kit

Kit

03-07-04 à 15:34

Lol ne t'inquiète pas, je n'avais pas fait l'amalgamme!
Kiss
Kitty


le hasard fait bien les choses!

chevre

chevre

12-07-04 à 00:15

Je ne me suis retrouvé sur ton joueb que par un maleureux hasard, mais sa a suffi. Rien que le titre, sa ma perturber! J'ai donc pris la liberté de lire les articles, y laissant des commentaires ici et là. Mais sur cette article, j'ai craqué. Moi qui ait la prétention de vouloir aussi commencer des essais de romans, moi qui me prétend bienveillant, tu me remets à ma place, enfin!!!
Ce texte, bien que assez court, est rédigé avec classe et passion. Je ne sais pas vraiment, qu'ajouter d'autre? -Ah si: Bravo!!!

Chèvre, en admiration!!!


Re: le hasard fait bien les choses!

Kit

Kit

12-07-04 à 00:24

Je te remercie bcp!! N'hésite pas à laisser des commentaires, ça me fait tjrs chaud au coeur! Tout particulièrement celui-ci... :)!!!
Kiss
Kitty


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